La même chose que la Corse. C’est, en substance, la demande exprimée par le président de la Région Bretagne, Loïg Chesnais-Girard, suite aux déclarations d’Emmanuel Macron brisant le tabou de l’autonomie. Avec, à l’appui, un rapport transpartisan, cosigné par l’ensemble des groupes du conseil régional, à l’exception du Rassemblement national, remis jeudi à la Première ministre. « En Bretagne, on a presque une unanimité », se réjouit Paul Molac, pilier de l’équipe « régionaliste » de Loïg Chesnais-Girard au conseil régional (au même titre que Christian Troadec, fondateur des Vieilles Charrues et acteur du mouvement des bonnets rouges).
Mais de quelle autonomie parle-t-on ? Pour Loïg Chesnais-Girard, il s’agit de « décider au plus proche du terrain, pour plus d’efficacité » sur un plus grand nombre de sujets. Le tout « dans un état d’esprit de confiance réciproque entre, d’un côté, le gouvernement et les parlementaires, et, de l’autre, les collectivités locales ». Présidente du groupe Droite, centre et régionalistes au conseil régional, Isabelle Le Callennec est sur une ligne proche, préconisant de « cultiver la proximité » pour « faire plus efficace et plus lisible pour les citoyens ».
Un peu tiède pour la plateforme Bretagne majeure, qui regroupe une vingtaine d’associations régionales. Rappelant « l’immense espoir que le vœu voté à une large majorité par l’hémicycle régional, en avril 2022, avait suscité », elle regrette que la démarche se traduise par « une politique des petits pas ». L’un des points de faiblesse étant, à son sens, l’absence du terme « peuple breton » dans le document transmis à Élisabeth Borne.
« Stratégie de seconde ligne »
Loïg Chesnais-Girard « tente, en réalité, de faire oublier son inaction et son manque d’ambition sur la question », accuse Joannic Martin, vice-président du Parti breton (1,6 % des voix aux dernières élections régionales). « Les nationalistes corses ont prouvé que seul le rapport de force politique avec l’État permet d’obtenir de réelles avancées. La stratégie de seconde ligne de Loïg Chesnais-Girard ne fera que maintenir les Bretons dans l’espoir mais n’aboutira à aucune réalisation concrète », redoute-t-il.
À l’inverse, l’autonomie façon Loïg Chesnais-Girard inquiète le président du conseil départemental du Finistère, Maël de Calan. « La Bretagne ne doit pas suivre le même chemin que la Corse. Oui à la décentralisation et au pouvoir local, non à l’autonomie », a-t-il tweeté dès vendredi, estimant que « c’est un projet politique qui coupe progressivement les liens avec la République ».
Une argumentation développée dans une tribune, à laquelle s’associe le président du conseil départemental du Morbihan, David Lappartient. Montée au créneau qui n’est, probablement, que la préfiguration des affrontements à venir entre ces deux figures de la droite et Loïg Chesnais-Girard. Sur ce sujet comme sur d’autres.
Autonomie de la Corse : un horizon encore flou
Il est encore difficile de décrire précisément à quoi pourrait ressembler l’autonomie promise par Emmanuel Macron à la Corse. Concrètement, le président de la République a donné six mois aux groupes politiques pour arriver à un accord avec le gouvernement, menant à un texte constitutionnel permettant de modifier le statut de l’île.
Les nationalistes corses souhaitent que, dans tous les domaines sauf le régalien, le pouvoir législatif soit confié à l’Assemblée de Corse (ils y occupent les trois-quarts des sièges). Leurs autres demandes ? Un statut de résident, la co-officialité de la langue corse et l’inscription de la notion de peuple corse dans la Constitution. L’opposition minoritaire de droite plaide, de son côté, pour un simple « pouvoir d’adaptation » des lois françaises aux spécificités corses. Les deux forces politiques vont maintenant devoir se mettre d’accord, sachant qu’Emmanuel Macron aura besoin d’une majorité des trois cinquièmes au Parlement (et donc des Républicains) pour réviser la Constitution.