Quand la baraque prend feu, il faut appeler un pompier. C’est dans ce rôle que Gennaro Gattuso débarque à l’OM. L’Italien, pourtant pas franchement réputé pour son tempérament calme, avait déjà été fortement pressenti pour remplacer Laurent Blanc à Lyon le mois dernier. Il rejoint finalement un autre Olympique mal en point.
Pourra-t-il remettre sur pattes une équipe déboussolée par un contexte interne houleux ? Ses résultats passés mitigés et une dernière expérience médiocre à Valence (7 victoires, 5 nuls et 10 défaites) laissent penser le contraire. A 20 Minutes, on croit même qu’il ne fera pas long feu, et on vous raconte le chemin qui mènera Gattuso à un licenciement express, d’ici trois mois.
28 septembre
Présentation de Gennaro Gattuso à la presse par Pablo Longoria, qui réalise un coup double : son nouvel entraîneur sera aussi son garde du corps personnel. Le contrat prévoit des bonus en cas de titres et de mâchoires de détracteurs brisées. Pour sa première intervention face à la presse, l’Italien balance une première punchline entre deux grognements : « Le pape François est venu bénir le Vélodrome, je viens pour maudire nos adversaires. »
Un discours chargé de testostérone comme Paul Pogba qui fait son effet sur X (Twitter) auprès des supporteurs mécontents du charisme négatif de Marcelino. Le nouveau coach de l’OM refuse par ailleurs de répondre à une question du journaliste de 20 Minutes à Marseille : « J’ai lu votre article di mierda, et tu crois que je vais te parler ? »
30 septembre
Premier match, première victoire (0-1) pour l’OM version Gattuso à Louis-II. Le gardien monégasque Philipp Köhn se troue sur une frappe à cinq rebonds de Valentin Rongier, alors que Pau Lopez est sauvé trois fois par ses montants. Remonté comme un coucou, Gattuso s’embrouille avec les trois Allobroges, le groupe ultra qui ambiance l’enceinte de la Principauté.
Un journaliste ose l’interroger sur ce succès pas malheureux, ce qui finit de faire sortir l’Italien de ses gonds : « T’as déjà joué au foot toi, à part avec des gonzesses dans la cour de l’école ? On a gagné avec de la sueur et une belle paire, c’est tout ce que je retiens. » Embarrassé, le traducteur tente d’adoucir la prose avec un « Ce que je retiens, c’est les trois points », qui ne convainc personne, même les non-Italophones.
5 octobre
Pas de miracle contre le Brighton de son compatriote (et soi-disant plus esthète) Roberto De Zerbi en Ligue Europa. Marseille perd 1-4 après une nouvelle prestation indigente de Chancel Mbemba et une possession à 21 % seulement. Gattuso regrettera ce penalty sur Aubameyang oublié par l’arbitre à la 67e minute, à 0-3, qui « aurait pu changer le match ». La qualification pour les 8es de finale de C3 déjà compromise, mais la prestigieuse Ligue Europa Conférence reste à portée de main.
7 octobre
Le staff de l’Italien réalise un gros coup en faisant venir Ciryl Gane le temps d’un entraînement à la Commanderie dans le but d’inculquer les valeurs qui furent celles de Gattuso du temps de sa gloire. « Un bon coup de coude ou un coup de genou bien placé, ça peut faire la différence au MMA comme au foot », justifiera l’Italien.
Les joueurs marseillais s’inquiètent du peu de temps consacré à l’assimilation d’un nouveau schéma tactique mais leur cardio s’améliore considérablement. Faute d’avoir une vision de jeu, Valentin Rongier n’est plus très loin des minima pour Paris 2024 sur 10.000 m.
8 octobre
Douche froide sur le Vélodrome. Le promu havrais vient s’imposer 2-3 sur la pelouse du Vélodrome, avec un triplé de Mohamed Bayo. Entré à la 80e minute, Joaquin Correa rappelle qu’il joue toujours au foot en signant un doublé express que Gattuso, expulsé pour avoir insulté l’arbitre Gaël Angoula, ne verra qu’à la vidéo. « Je n’ai jamais vu un arbitrage aussi pourri, il faut le dire si je gêne », explose l’ancien Milanais après la rencontre, dans un excès de paranoïa.
Le lendemain, l’OM diffuse sur les réseaux sociaux quatre situations de penaltys non sifflés, selon le club, avec l’entraîneur italien en voix off. Une initiative qui divise au sein du club, où le comportement et la tactique du nouveau technicien interrogent de plus en plus.
20 octobre
Surprise à la Commanderie lors de la conférence de presse traditionnelle de veille de match, puisque Gattuso ne se présente pas devant les médias. « Gastro-entérite foudroyante » communique le club en off. Hasard ou coïncidence, alors que la Ligue 1 se mobilise contre l’homophobie le lendemain ? Gattuso « qui n’aime pas les fringues Desigual », dixit un proche, ne sera pas non plus sur le banc à Nice.
Pas de brassard arc-en-ciel, donc, pour celui qui avait déjà fait preuve de son ouverture d’esprit sur le sujet en 2008 : « Les noces entre homosexuels, je ne suis pas d’accord. Pour moi, c’est entre un homme et une femme. Oui, cela me scandalise, parce que je crois en la famille. Mais bon, chacun fait ce qu’il veut. »
22 octobre
Gennaro Gattuso est aperçu en terrasse par un supporteur marseillais au lendemain de la déroute contre l’OGC Nice (3-0). Celui-ci l’apostrophe en se filmant. « Nous, on pleure toute la journée devant notre écran et vous êtes là en terrasse au lieu de revoir les matchs pourris qu’on a faits pour les analyser. »
Moins sympa que Vitinha, l’Italien pose le couvert, prend une serviette, s’essuie calmement les lèvres puis se lève pour faire face au supporteur mécontent. « T’as un problème Hagrid ? Retourne dans ta cabane pour voir si j’y suis. » La suite est floue : une gifle, le téléphone tombe, le supporteur implore la pitié de son agresseur et part en courant.
28 octobre
Lors de la conf de veille de match contre le rival lyonnais, Gennaro Gattuso signe sa masterclass ultime dès la première question, axée sur son éventuel ressentiment de s’être pris un stop par l’OL le mois précédent : « Franchement, vous croyez que les supporteurs lyonnais sont comblés d’avoir choisi le coach le plus gominé des deux ? En 2006, j’ai permis à Grosso d’obtenir le plus grand titre de sa carrière. Mais je ne compte plus lui faire de faveur, et surtout pas à l’autre Amerloque qui m’a donné sa parole avant de bloquer mon numéro. D’ailleurs, passez-lui le message : je compte bien le voir avant le coup d’envoi dans le couloir du Vélodrome pour lui montrer, d’homme à homme, la quarantaine de messages qui lui étaient destinés à l’époque. »
29 octobre
Cataclisma ! Toujours lanterne rouge de Ligue 1 après son pathétique 0-0 contre Clermont une semaine plus tôt, l’OL vient une nouvelle fois martyriser l’OM au Vélodrome pour… sa première victoire de la saison en Ligue 1. Gattuso vit très mal l’absence de réaction de ses troupes dans ce bien pâle Olympico seulement marqué par le chambrage appuyé de Caleta-Car face au virage sud après son but déterminant (0-1).
« Même à l’OFI Crète et à Pise, j’avais une attaque plus dangereuse qu’ici, balance-t-il hors de lui. S’il faut que je signe mon pote Pippo Inzaghi pour qu’il apporte de la concurrence ici, je le ferai. A 50 piges, il marquerait encore contre une équipe aussi pitoyable que Lyon. »
5 novembre
Après un triste match nul (0-0) contre le Losc de Paulo Fonseca, Gattuso débarque fou furieux en conférence de presse à cause d’un penalty oublié par Stéphanie Frappart. « Mais c’est quoi ce championnat de mer** dans lequel des femmes arbitrent ? Je n’ai jamais vu ça de ma vie ! Le foot, c’est pour les mecs », dénonce-t-il, avant de s’apercevoir que son attachée de presse est une femme. Fichue myasthénie, cette maladie qui lui cause des troubles de la vision depuis dix ans et l’oblige à porter régulièrement un cache œil de pirate.
4 décembre
Une réunion, prévue de longue date, vire à la guerre des tranchées entre les groupes de supporteurs de l’OM et la direction. Les représentants, Rachid Zeroual en tête, reprochent à Longoria d’avoir recruté un entraîneur encore plus fou qu’eux, plus que les mauvais résultats et la position de relégable du club.
Sauf que ce malin de Pablo Longoria a eu la bonne idée d’inviter Gattuso à cette sympathique entrevue, et l’Italien démarre le leader des South Winners : « Tu crois que c’est un papy grisonnant qui va m’apprendre à jouer au dur ? ». « Viens le dire au local », lui répond Zeroual, et la réunion en reste là.
5 décembre
Gennaro Gattuso est du genre à prendre les choses au premier degré et le voilà qui prend seul la direction de la rue Loubon. Sans prévenir, il pénètre le fameux local des South Winners et défie Rachid Zeroual : « Gli ho tolto la testa dalle spalle (je vais te décapsuler la tête des épaules, selon Google trad). » Face à une telle menace, et pris à son propre jeu, Rachid Zeroual annonce sa démission le soir même.
20 décembre
L’OM termine 2023 par un nul quelconque à Montpellier (0-0). 16e de Ligue 1, Marseille implose. Mais Gattuso est confiant, le mercato approche et il y aura sûrement des choses à faire avec le portefeuille infini de son agent Jorge Mendes. L’Italien et le Portugais s’entretiennent avec Pablo Longoria à la fin de la soirée pour planifier une réu mercato le lendemain.

21 décembre
Mendes pose une boîte de pasteis de nata et ses quatre téléphones sur le bureau du président de l’OM. L’un d’entre eux, le « téléphone rouge », n’arrête pas de vibrer. C’est la ligne directe avec CR7, avec qui il est toujours en relation malgré la rupture avec Gestifute : le Portugais, furieux de ne pas recevoir assez de centres sur la tête en Arabie saoudite, veut de nouvelles recrues. « J’ai seulement 0,8 xG par match Jorge, não é possivel ! »
Entre deux caprices de sa star, le super agent propose un pack de rêve à Longoria : Sergio Oliveira (un carton jaune par match minimum), João Moutinho (92 ans) et Rui Patricio (n’arrête plus un ballon depuis la finale de l’Euro 2016). L’Espagnol a à peine le temps d’en placer une que Gattuso tape du poing sur la table. « Je veux ces recrues. Si je ne les ai pas, je me casse d’ici. Capisci ? » La réunion s’achève sur un dernier coup de fil de CR7. « Je dois filer, Cris a pété son tapis de course et ses patchs d’électrostimulation pour les abdos », s’excusera l’agent.
24 décembre
Pablo Longoria n’a aucune intention de céder aux exigences du tandem luso-italien, qui le harcèle depuis 72 heures. Pablo ne dort plus, tourne à six cafés par jour et finit par craquer. Il convoque Gattuso pour le remercier. Trop peu de résultats, trop d’expulsions et de polémiques. Mendes aura été la goutte de trop. L’OM va connaître un quatrième entraîneur en une demi-saison. Et joyeux Noël.